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PeCHE SUR GLACE

PÊCHE SUR GLACE

Pêcher sur la glace

 

Le Québec et ses images d’Épinal. L’une d’elles appartient à l’hiver : la pêche sur la glace, aussi appelée pêche blanche. 

Une coutume héritée des Amérindiens qui se pratique un peu partout et que j’ai pu tester il y a quelques années avec des amis et leurs enfants. 

 

Chaque année, quand la glace devient assez épaisse, de drôles de petits villages apparaissent sur la surface figée des lacs et des rivières au Québec, et même sur des étendues bien plus imposantes, comme le fjord du Saguenay [par exemple dans le charmant village de Sainte-Rose-du-Nord]. 

Dans les petites cabanes de bois multicolores, le confort est souvent rudimentaire, mais le poêle à bois qui parfume l’espace restreint (et vos vêtements) suffit à votre bonheur. 

La nôtre se résume à deux fenêtres, quatre chaises, une table et quelques bûches pour réchauffer les organismes, une tasse de thé ou de café au creux des mains. Nos joues sont écarlates. De l’extérieur, les maisonnettes ont l’air de radeaux en perdition, mais à l’intérieur, c’est un plaisir immense qui s’engouffre sans faire craquer les murs. Une des cabanes fait office de toilettes.

 

Rouler sur la glace

Nous avons réservé notre petit havre de bonheur sur un des lacs les plus fréquentés en matière de pêche blanche : celui des Deux-Montagnes, à une petite heure de Montréal. 

Je suis surpris pas la solidité du manteau opaque, observant, à la fois incrédule et inquiet, ces voitures allant et venant sur cette étendue blanche sans l’ombre d’un craquement. L’appréhension passée, on se laisse aller à toutes sortes de loisirs. La pêche n’est souvent qu’un prétexte. Le champ de glace se mue par exemple en terrain de hockey. 

Une fois sur place, on nous remet notre droit de passage, puis on récupère nos cartes de pêche. On va ensuite chercher le matériel nécessaire au bureau d’accueil, ainsi que des alevins vivants en guise d’appât. 

 

Forer avant de pêcher

Avant de pêcher, il faut creuser un trou. Mais quand la glace atteint des dizaines de centimètres d’épaisseur, les grands moyens s’imposent. Une perceuse à glace fera l’affaire. Elle fore le bouclier en quelques secondes. 

Et après ? Vous plantez un morceau de bois devant chaque trou. Un second vient se poser en équilibre sur le premier. Le fil est lesté avec un peu de plomb, au-dessus duquel se trouvent le petit éperon et sa victime frétillante. Ensuite, il faut avoir l’œil, et le bon. La tige pique du nez ? Faites vite si vous voulez ne pas rentrer bredouille. Il se peut que parfois le vent vous induise en erreur. 

 

Le revers de la pêche, c’est la médaille de l’ennui. Aux chanceux les mains pleines, aux autres l’overdose du temps qui passe. Nos vingt trous nous laissaient envisager une belle razzia, mais au bout de la ligne, le bilan s’est révélé dérisoire, avec trois perchaudes et un brochet rachitique. On a remballé nos gaules (et nos bières) quand le soleil remballait les siennes. 

Notre petite cabane a fini par retrouver sa quiétude, vidée des paroles d’enfants et des rires qui l’avaient rendu plus grande. Le propre du bonheur est d’embellir tout ce qu’il touche. Fort heureusement, il n’a fait pas fondre la glace ce jour-là. 

Olivier Pierson.

Photos fournies par la Sépaq (Société des établissements de plein air du Québec).